Cet article a été publié pour la première fois dans le numéro 92 Journal du Management Juridique et Réglementaire d’Entreprises du Village de la Justice, édition de Février/Mars 2023, page 40, disponible sur ce lien en lecture ou en téléchargement : https://www.calameo.com/read/000000178ff45301f499b.
Il ne peut exister de développement économique sans sécurité juridique. Ce postulat de base est partagé par la plupart des états membres de l’OMC et se reflète par la signature d’accords bilatéraux ou multilatéraux entre États. Les entreprises françaises peuvent ainsi s’appuyer sur le réseau d’accords bilatéraux sur la promotion et la protection des investissements conclus par la France et l’Union européenne avec des pays tiers pour favoriser leur développement à l’international.
La France et la République Populaire de Chine ont signé le 26 novembre 2007 un accord portant sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements (« l’Accord »), avec pour objectif d’encourager, de créer des conditions favorables et de protéger les investissements réciproques, tout en stimulant les transferts de capitaux et de technologie entre les États parties. Cet Accord est entré en vigueur le 20 août 2010, l’accord au niveau européen n’étant pas définitif à ce stade. Méconnu des investisseurs français, il définit d’une part ce que sont les investissements (1), d’autre part les mesures d’encouragement de ces derniers (2), et enfin les mesures de protection applicables (3).
1. L'investissement
L’Accord définit l’investissement de manière large comme désignant tout avoir investi régulièrement par un investisseur d’un État partie sur le territoire ou zone maritime de l’autre, avant ou après l’entrée en vigueur de l’Accord.
Il s’agit de tous biens, droits et intérêts de toute nature, notamment biens meubles, immeubles, actions, autres participations dans une société constituée sur le territoire de l’autre État partie (même minoritaires ou indirectes), droits de propriété intellectuelle ou commerciale, etc.
L’investissement peut être réalisé par une personne physique ou morale (société ou organisation à but non lucratif ayant la personnalité juridique), et fait l’objet de mesures d’encouragement.
Il s’agit de tous biens, droits et intérêts de toute nature, notamment biens meubles, immeubles, actions, autres participations dans une société constituée sur le territoire de l’autre État partie (même minoritaires ou indirectes), droits de propriété intellectuelle ou commerciale, etc.
L’investissement peut être réalisé par une personne physique ou morale (société ou organisation à but non lucratif ayant la personnalité juridique), et fait l’objet de mesures d’encouragement.
2. Les mesures d'encouragement à l'investissement
Outre l’admission des investissements, l’Accord énumère certains principes, tels que le traitement juste et équitable (2.1), le traitement national et traitement de la nation la plus favorisée (2.2), le principe de libre transfert (2.3).
2.1 Conformément aux principes du droit international, le principe du traitement juste et équitable implique
l’examen avec bienveillance des demandes d’entrées, séjour, travail et circulation venant de ressortissants de l’autre État partie au titre d’un investissement, ainsi que des facilités matérielles pour l’exercice de leurs activités professionnelles. Ce traitement doit être aussi favorable que celui accordé aux investisseurs locaux.
2.2 Selon le principe de traitement national et de la nation la plus favorisée, chaque État partie se doit d’accorder aux investisseurs de l’autre État partie un traitement aussi favorable que celui accordé à ses investisseurs et aux investisseurs de la nation la plus favorisée, sous réserve des privilèges accordés aux investisseurs tiers en vertu de zone de libre-échange, union douanière, marché commun ou autre forme d’organisation économique régionale.
2.3 Le principe de libre transfert énonce quant à lui que les investisseurs bénéficient du libre transfert des intérêts, dividendes, bénéfices et autres revenus courants, des redevances de certains droits incorporels (propriété intellectuelle, commerciale, etc.), et du produit de la cession ou liquidation totale ou partielle de l’investissement (y compris plus-values du capital investi). Les nationaux autorisés à travailler au titre d’un investissement étranger sur le territoire ou la zone maritime de l’autre État partie sont par ailleurs autorisés à transférer dans leur pays d’origine une quotité appropriée de leur rémunération.
Ces principes d’encouragement sont par ailleurs sanctionnés par des mesures de protection des investissements.
3. Les mesures de protection des investissements
Les investissements réalisés par un investisseur d’un État partie sur le territoire ou la zone maritime de l’autre État partie bénéficient d’une sécurité pleine et entière selon les termes de l’Accord. Les mesures visent d’une part l’indemnisation en cas de dépossession (3.1.), et d’autre part d’encadrement du règlement des différends entre investisseur et État partie (3.2).
3.1 Il est ainsi précisé que les investissements ne peuvent en aucun cas faire l’objet de mesures de dépossession directe ou indirecte (expropriation ou nationalisation), sauf utilité publique et à condition que les mesures ne soient pas discriminatoires. Dans ce dernier cas, le versement sans retard d’une indemnité appropriée (soumise à intérêts), égale à la valeur réelle des investissements (dans le cadre d’une situation économique normale et antérieure à toute menace de dépossession) est prévu, dont le montant et les modalités
de paiement sont fixés au plus tard au moment de la dépossession.
À noter que toutes pertes dues à la guerre ou à tout autre conflit armé, révolution, état d’urgence national ou révolte, bénéficieront d’un traitement tout aussi favorable que les investisseurs locaux ou ceux de la nation la plus favorisée.
3.2 Par ailleurs, en cas de survenance d’un différend entre un investisseur et un État partie, les parties auront la possibilité, après tentative de règlement amiable dans les 6 mois de la date de déclaration du différend et à la demande de l’investisseur, de :
– faire une demande auprès du tribunal compétent de l’État partie ; OU
– recourir à l’arbitrage d’un tribunal arbitral ad hoc (établi selon les règles de la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International – CNUDCI) ; OU
– recourir à l’arbitrage du Centre International pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements – CIRDI).
Le choix entre ces options est définitif, tout comme la sentence arbitrale le cas échéant, dont les États parties s’engagent à assurer l’exécution.
Pour conclure, l’existence d’un tel Accord est une garantie supplémentaire et ultime pour les sociétés françaises souhaitant investir en Chine. Les investisseurs coréens et japonais ont recours depuis de nombreuses années à leurs accords avec la Chine, ce qui prouve l’efficacité du mécanisme juridique.
Nicolas COSTER, Avocat au Barreau de Paris, Arbitre, Fondateur du Cabinet Coster Associates
Fatéma ADAMJEE, Juriste